Juin 2022
Pour cette édition, nous creusons la piste des ressources humaines… ou plutôt inhumaines.
Entre la machine à café et le petit bureau du fond, les réunions interminables et les difficiles rapports d’autorité, le monde de l’entreprise est un vaste territoire à fantasmes ! D’ailleurs, l’entretien d’embauche qui tourne mal est un grand classique des jeux de rôles BDSM. Impossible, donc, de ne pas nous emparer de ce thème pour lui donner nos lettres de noblesse : DRH alias “Dames Résolument Hautaines” ou, allez savoir, “Dominatrice Réellement Horribles”.
Candidat numéro un, entrez !
LE SAVIEZ-VOUS ?
Organisation, implication, motivation, sérieux… Voilà quelques-unes de nos qualités ! En DRH polyvalentes et responsables, nous nous étions distribué les rôles : Maîtresse Blanche était en charge du pôle “punitions et récompenses”, Inanna Justice du service “training et développement” et Madame Lule de la branche “gestion de talents”.
Partager le pouvoir pour mieux régner, voilà le secret… pour une “petite entreprise qui ne connaît pas la crise”.
UN JEU, UN BOUDOIR
Débauche et désir, parfaite combinaison… d’où l’une des premiers commandements de notre maison close :
– Donnez-nous envie !
Comment ? Au moyen d’un strip-tease improvisé, évidemment !
Assises en ligne sur un canapé, stylo en main pour évaluer les performances de chacun, nous assistons à divers numéros d’effeuillage sur un tube de circonstance : Sex Machine. Timides ou assurés, avec un sens aigu du rythme ou du ridicule, nos Chippendales d’un jour ont, en quelques minutes, révélé – et donné – beaucoup d’eux-mêmes.
Il n’y a pas que les masques qui sont tombés !
TÉMOIGNAGE
Il en aura fallu du temps ! Depuis mars et quelques Covid, l’impatience a eu le temps de grandir ! Les dernières minutes – était-ce des heures ? – ont été longues ! Un stress lié à mon téléphone qui tente désespérément de vous joindre le vôtre et tombe sur votre boîte vocale.
Une bande hétéroclite qui s’infiltre discrètement par une porte cochère faisant mine de ne pas savoir que chacun était là pour la même chose.
Un escalier interminable et une porte, enfin, qui s’ouvre sur trois paires d’yeux qui me dévisagent !S’ensuit une période de flou ou on se salue, on s’habille, on se découvre furtivement. L’ambiance est étrange, pleine de trac d’avant l’entrée en scène et de cœur qui bat vite.
“Laisse ton cerveau à la maison ! m’avait dit une amie à propos de cette soirée.” J’ai suivi ses conseils et bien m’en a pris ! Sinon, ne serais-je pas parti en courant Fini de penser de toute façon ! Déjà je dois donner une douche à R*, puis me glisser vers le boudoir proprement dit ou je suis placé à genoux, les yeux bandés par Maîtresse Blanche.
Tout le monde s’installe dans un cercle et après quelques mots d’introduction d’Inanna exposant des règles et les rôles (qui voleront en éclats rapidement !), nous commençons la lecture de nos lettres. La consigne est simple : la personne à notre droite est chargée de donner une critique positive, celle à notre gauche, une critique négative !
Tout le monde y parvient tant bien que mal. Formuler une critique de manière positive est un art difficile à maîtriser. Formuler une critique dans le but d’aider l’autre à progresser prend du temps. Voir les vrais points faibles. Les éviter. Imaginer de faux points faibles avec la juste dose de mauvaise foi ! S’assurer qu’ils ne seront pas blessants. Les formuler avec une juste dose d’humour. Tout ça en ayant laissé mon cerveau à la maison ! C’était un beau défi !
Mon tour de lire ma lettre vient. On devrait enseigner dans les écoles l’art de lire un texte à genoux, dans un salon surchauffé, le cœur battant à 150, la vue brouillée par l’émotion, en présence de trois dominatrices qui mettront bientôt un point d’honneur à interrompre la lecture ! Vous y êtes, bien sur, parvenues : je n’ai pas atteint le bout de ma lettre ! Vient alors le moment de donner une chose pour laquelle on s’estime doué dans l’univers BDSM. C’est typiquement le genre de choses sur lesquelles je bloque de peur de dire des choses inappropriées. J’ai choisi de faire un peu de provocation en évoquant mon talent particulier pour vous habiller, /vous, Madame Lule/… sans filer vos bas ! Et puis c’est vrai ça, à quoi suis-je doué, finalement, du haut de ma faible expérience et de ma première fois dans un groupe multi soumis ?
J’ai une certaine résistance à la douleur et j’y prends du plaisir. Il me semble avoir une capacité correcte à conserver ma lucidité et à exécuter des ordres même sous tension et j’en éprouve une certaine fierté.
Je sais faire preuve de patience et j’y attache de l’importance.
Ce serait tellement plus simple de lister ce pour quoi je ne suis pas doué !
Voilà la transition parfaite vers le temps suivant ! Un exercice difficile d’expression corporelle : je suis vraiment bloqué sur ce point ! Pas doué, bloqué, sans imagination… un combo parfait pour se ridiculiser ! Heureusement que l’ambiance est bienveillante et que les grands éclats de rire d’Inanna ainsi que les vôtres m’aident à me décrisper un peu !
Madame Lule m’offre un temps de récupération à ses pieds pendant que des choses se mettent en place un peu partout à l’initiative d’Inanna ou de Maîtresse Blanche.
Bientôt Madame Lule m’ordonne d’aller chercher un collier et une laisse. Je vis une belle émotion, un sentiment assez inattendu au moment où le collier se serre. Le sentiment d’être un peu mieux armé pour la suite de la soirée. D’être un peu libéré pour pouvoir être un peu plus spontané. Madame peut faire ce qu’elle veut de moi dans ces moments-là.
“Quelle est la meilleure et la pire punition pour vous ?” me demande Madame Lule. Plusieurs me sont venues en tête et j’ai cité le fait d’être contraint longtemps dans une posture très douloureuse. Après quelques jours de réflexion, je maintiens ! Même si, dans le cadre d’une soirée comme celle-ci, être mis à l’isolement serait une punition très dure.
– La meilleure ?
– Recevoir une fessée !
– Par qui ?
– Peu importe, vraiment.
J’aurais dû ajouter : “Du moment que vous n’êtes pas trop loin !” J’étais enchaîné, les yeux bandés, fessé par O* et P* puis R*, eux-mêmes guidés par vous. J’ai senti Madame Lule tourner autour de moi. J’ai senti Maîtresse Blanche me frapper les testicules. J’ai senti Inanna me fesser durement de toute son énergie à la main puis de manière presque caressante avec les martinets. La chaleur sur mes fesses, la tension, l’abandon… A défaut de jouir physiquement, j’ai joui mentalement de cette situation.
Quand Inanna m’a détaché, j’avais perdu le sens du temps : j’ignorais combien de temps j’avais passé attaché la. J’ai pu m’octroyer une pause et admirer mes complices se faisant malmener. Strap-on, fessées, chatouilles, godes, tout s’enchaîne très vite ! J’observe ça avec beaucoup de plaisir, assis sur mon nuage ! Et puis soudain… “Qui a déjà testé le gingembre ?” Nous l’avons presque tous déjà testé et même si j’avais bien imaginé que le jus de gingembre pouvait être détourné en décidant d’en amener une bouteille, je n’ai pas été déçu de l’usage que vous en avez fait !
J’ai vite senti le gingembre me chauffer et P* également !
J’ai adoré vous “assister” quand vous vous êtes chargé de P*. J’étais dans une position privilégiée pour vous observer et pour observer ses réactions. Quand vous m’avez demandé de lui donner un ordre, je suis resté sans voix ! Dans les très rares moments de ma vie où j’ai switché, c’était avec des gens que je connaissais parfaitement. Vous auriez peut-être aimé et lui également que je sois un peu plus directif, mais ne le connaissant pas du tout et n’ayant aucune idée de ses limites et souhaits, ça m’a bloqué.
La séance s’est conclue sur l’enregistrement des bruits de D* réalisant une gorge profonde avec un plug gonflable dans les fesses. Un moment joyeux (!) pour nous tous et probablement très intense pour lui !
L’heure était venue, déjà ! de redescendre sur terre. J’ai aimé la douceur dont vous avez fait preuve pour m’y aider. Le bilan de cette soirée à commencé dès nos premiers échanges entre soumis pendant vos délibérations. Nous avions tous des étoiles dans les yeux !
La chaîne de soumis reliés par les tétons, les votes, les pinces qui s’en vont dans une douleur libératrice et puis le débrief. Quelle très belle idée ! Après une telle intensité, se poser et se questionner à chaud sur les choses qu’on a aimé et dont on est fiers, c’est vraiment positif.
/…/ C’était la première fois de ma vie que je participais à un événement multi-soumis. J’étais le moins expérimenté puisque tous avaient déjà vécu des expériences en club ou vécu des séances auprès de nombreuses dominatrices depuis de nombreuses années. C’était donc particulièrement intéressant de les observer et de les écouter parler.
O*, expérimenté, à l’aise, semblant tout à fait en accord avec ses désirs.
P*, plus réservé, qui a semblé avoir un peu de mal à reprendre son souffle tant il ne s’attendait pas à ce qu’il a vécu !
D*, avec qui le hasard a voulu que j’ai moins de contacts, mais que j’ai trouvé drôle et investi !
Et R* avec qui, de la douche aux pinces à seins en passant par nos lettres et notre échange de vote final, j’ai eu beaucoup d’interactions !
/…/
Le lendemain Madame Lule a écrit dans un tweet : “Shame dies when stories are told in a safe place.” Ça résume tellement ce que j’ai pu ressentir et ce vers quoi je veux tendre ! Je confirme ce que j’ai dit sur l’instant au moment du débrief : Si l’occasion de revivre un tel événement se présente à nouveau, je le referai sans hésiter !